Lorsque j’écrivais l’article sur “l’amour coriace” ou “l’amour qui secoue” la semaine dernière, c’était pour évoquer la manière dont on doit quelques fois “secouer, voire “bousculer” les membres de notre équipe pour qu’ils puissent évoluer, atteindre un niveau supérieur.
A la suite de l’article, une des questions posées a retenu mon attention – «Comment savoir si l’on “pousse” trop fort ou trop loin les limites ou si il est préférable de ne pas insister?”
Je tente ici d’y répondre:
Ce n’est pas simple bien sûr mais si vous êtes proche de votre équipe, si vous êtes attentif et conscient de l’habilité et de la capacité de chacun d’entre eux à atteindre l’objectif alors il vous sera certainement plus facile de répondre vous aussi à cette question.
Nous avons besoin d’être suffisamment proche de chacun et attentif à l’équipe afin de nuancer, l’équipe se plaint-elle d’un travail trop intense? trop lourd? Si de toute évidence on atteint la limite, il devient nécessaire de relâcher la pression.
Aujourd’hui, j’ai couru une longue distance afin de me préparer au mieux pour mon prochain Marathon qui aura lieu à Cologne dans 3 semaines. Cette fois-ci, je serai accompagné de 6 personnes qui ont décidé de courir avec moi leur premier Marathon ou demi-Marathon.
Comme vous pouvez l’imaginer, il s’agit d’un entrainement qui nécessite beaucoup de temps et d’énergie et qui demande une grande volonté, il faut s’entrainer régulièrement car les progrès sont lents et l’effort physique inhabituel provoque quelques fois des douleurs et certainement de l’inconfort.
Le Marathon a ses exigences, il demande beaucoup de préparations sans lesquelles il est pratiquement impossible d’aboutir. Pour réussir à parcourir 42 km, il faut se préparer progressivement et courir des distances de 25, 30 et 35 km pendant la période d’entrainement qui précède l’événement.
Mon premier article sur “l’amour coriace” faisait allusion à mon ami Dave qui avait besoin d’encouragements, il a besoin qu’on le sorte de sa zone de confort, de sa coquille… Je sais qu’il est capable de parcourir la distance du Marathon car nous avons régulièrement parcourus de longs trajets ensemble mais il lui arrive d’en douter.
Aujourd’hui, il s’agit d’un autre ami, Mithun, je l’ai également encouragé et il a rapidement progressé en distance, de quelques courses de 5 km, il est passé à 15 km en peu de temps. Cependant, sa plus longue course achevée est de 25 km et il ne nous reste que 3 semaines. Aujourd’hui, pour la progression de l’entrainement, il est nécessaire qu’il puisse atteindre au moins 30 km ou, idéalement 35 km.
Pendant notre parcours, j’ai réalisé que ce ne serait pas possible pour lui aujourd’hui et qu’il n’arriverait peut être même pas à atteindre les 20 km… et encore moins les 30. Ce qui automatiquement réduit ses chances de finaliser un Marathon vu le peu de temps qu’il nous reste pour la préparation.
Je suis parfaitement conscient qu’il a la volonté et le courage pour réussir mais il ne lui reste pas assez de temps pour se préparer au mieux et donc d’atteindre la ligne d’arrivée dans 3 semaines. Il a de l’énergie et beaucoup de détermination mais pas l’entrainement nécessaire pour ce challenge.
Je l’ai donc vraiment secoué et bousculé pendant notre parcours, pas pour qu’il finisse absolument ses 30 km et atteigne le but du jour mais plutôt pour lui faire comprendre et lui faire accepter la situation : C’est un fait, il n’est pas assez entrainé pour le Marathon, par contre, il est fin prêt pour un demi-Marathon.
C’est ça aussi “l’amour coriace” car il est difficile de dire à quelqu’un que ses chances de succès sont trop minces ou quasi nulles car il n’a pas tous les atouts en main et que pour y arriver, il lui faudra remettre son projet à plus tard.
Un Leader doit mettre son équipe en position de départ pour le succès, pour la médaille et si j’avais insisté pour que Mithun fasse ce Marathon coûte que coûte, je n’aurai certainement pas agi en bon Leader (ni en ami) et même si il acceptait de se laisser “secouer” durant le parcours, il me fallait aussi et surtout l’aider à accepter de différer son challenge.
La sagesse est, dans nombre de cas, meilleure conseillère que le courage. Elle nous évite de commettre des erreurs et cela aurait vraiment été une erreur de ma part de “pousser” Mithun ou de m’obstiner à l’encourager à accomplir l’impossible (pour cette fois)
De toute manière, pour Mithun, l’expérience d’un demi-Marathon sera une excellente chose, il aura le plaisir de participer à l’événement, sera heureux de cette distance accomplie, de son succès et sera certainement très encouragé pour la prochaine étape qui sera un Marathon dans quelques mois.
Si nous ne tenons pas assez compte des personnes qui composent notre équipe, il devient alors difficile de les comprendre et de savoir si nous les poussons trop fort, si c’est le moment ou non de les pousser vers le but ou tout simplement quand il est préférable de lâcher du lest ou de leur offrir notre support.
Traduit par Carine Tredgold